Gianmaria Testa : De ce côté-ci de la mer

 In Bibliofolie

Le pas lent et silencieux guide celui qui marche comme une hypnose. Le rythme lent des semeurs de blé, les Seminatori di grano de Gianmaria Testa, couché sur le papier, est une invitation à saisir cet objet étonnant qu’est De ce côté-ci de la mer. C’est prudemment qu’il faut se glisser dans ce livre, ouvert par la directrice de collection, Martine Laval, puis par Erri de Luca, compère et humaniste. Ils évoquent avec sensibilité leur rencontre avec le chanteur piémontais.

Familiarité & rencontres

Le plus souvent, les chapitres portent le titre familier des chansons qui composent Da questa parte del mare. À chaque fois, le texte en français de la chanson est précédé d’une tranche de vie. Ces instants, ce sont ceux des rencontres. Il les raconte, pudique. À chaque fois, Gianmaria Testa se dévoile dans le creux de la vie de ces gens qui lui ont importé, parfois fugacement. À chaque fois, ces récits éclairent ou nourrissent les chansons, esquissent un Piémont passé et présent, tracent des lignes entre Europe et Afrique, disent les peurs, les révoltes, les heurs, les petits bonheurs.

© Federico Pedrotti

Le singulier & l’universel

En lisant De ce côté-ci de la mer, on peut être surpris d’en suivre les pages avec lenteur, au rythme des mélodies qui reviennent en mémoire. Et la mémoire continue son voyage, dépasse l’auteur. Comme souvent, une autobiographie parle d’une manière singulière à celui qui la lit. La vie de l’auteur met en mouvement un processus intime, par l’évocation de détails, de positionnements, d’affaires, et pêche dans notre esprit des souvenirs lointains. C’est la force d’une autobiographie réussie que de dépasser son propre contexte.

L’écriture de Gianmaria Testa est comme sa voix, rassurante mais jamais tranquille. Par ses chansons, il livrait nos pensées les plus noires à l’humanisme le plus vif. Ici, il est sur le fil, sans complaisance, sans animosité non plus. Sans pour autant jouer les censeurs, il nous bouscule. De ce côté-ci de la mer est une leçon d’humilité et un témoignage sensible sur l’Italie et au-delà.

Épilogue

Le 29 mars 2012, j’ai le plaisir d’entendre Gianmaria Testa lors d’un concert dans les Alpes-Maritimes. À l’issue de ce moment de bonheur, je discute avec lui tout en vendant ses disques, le félicite. En réponse, il me parle de ses musiciens, du plaisir à les côtoyer, de Philippe Garcia, ce batteur qu’il ne veut pour rien au monde remplacer tant leur accord musical est parfait. Il est heureux de l’amitié que lui font ses musiciens et, en parlant d’eux, c’est bien de son rapport aux autres qu’il parle. Ciao Gianmaria.

Gianmaria Testa. De ce côté-ci de la mer. Traduit de l’italien par Danièle Valin. Paris : Les Éditions du Sonneur ; Ce que la vie signifie pour moi, 2019. 128 p.

Merci à Federico Pedrotti pour ce superbe portrait de Gianmaria Testa.


Un passo lento e silenzioso, quasi ipnotico, guida colui che avanza : è il ritmo lento dei seminatori di grano. «I seminatori di grano» di Gianmaria Testa, sulla carta, sono un invito a cogliere quell’oggetto sorprendente che è «Da questa parte del mare». Occorre inoltrarsi con cautela in questo libro aperto prima dall’intervento della direttrice della collana, Martine Laval, poi da Erri de Luca, compagno e umanista. Evocano entrambi con sensibilità il loro incontro con il cantante piemontese.

Consuetudine e incontri

Il più delle volte i capitoli hanno lo stesso nome delle canzoni che compongono «Da questa parte del mare». Ogni volta, il testo in francese è precedutto da una scena di vita. Questi momenti sono quelli degl’incontri Li narra con pudore. Ogni volta, Gianmaria Testa si svela nel cuore della vità della gente che gli è stata cara, anche se per brevi, fugaci momenti. Ogni volta, questi racconti chiariscono o nutrono le canzoni, abbozzano il ritratto di un Piemonte passato o presente, tracciano legami tra Europa e Africa, raccontano le rivolte, gli eventi, le piccole felicità.

L’individuale e l’universale

Leggendo «Da questa parte del mare», ci si può sorprendere a seguirne le pagine lentamente, al ritmo delle melodie che tornano alla mente. E la memoria prosegue il suo viaggio, va oltre l’autore. Come spesso accade, un autobiografia parla in modo individuale al lettore. La vità dell’autore muove un processo intimo con l’evocazione dei dettagli, le prese di posizioni, gli affari; pesca nella nostra mente ricordi lontani. E’ la potenza di un’autobiografia riuscita, questa possibilità di superare il contesto personale. .

La scrittura di Gianmaria Testa è come la sua voce, rassicurante ma mai tranquilla. Con le sue canzoni, affidava i nostri pensieri più neri all’umanesimo più vivo. Qui, è sul filo, senza compiacenza, senza animosità. Ci scuote senza essere censorio. Da questo nostro lato del mare è una lezione d’umiltà e una testimonianza sensibile sull’Italia, e ben oltre.

Epilogo

Il 29 marzo 2012, ho avuto il piacere di sentire Gianmaria Testa in un concerto sulle Alpi Maritime. Dopo questo momento di felicità, discutiamo mentre vende i suoi dischi, e mi congratulo con lui. Mi risponde parlando dei suoi musicisti, del  piacere della loro vicinanza, di Philippe Garcia, un batterista che per niente al mondo vorrebbe cambiare tanto è perfetto il loro accordo musicale. E’ felice dell’amicizia con i suoi musicisti e parlando di loro, parla in fondo del  proprio rapporto con gli altri. Ciao, Gianmaria.

Grazie mille a Federico Pedrotti per questo superbo ritratto di Gianmaria Testa.

(Traduction Maryline Bertoncini)

 

Clara Iannotta, Manu TheobaldJakob Le balcon