LGD – bisFRITON (double avis)

 In Resto

LGD : les esclavagistes blancs remettent le couvert

Non content d’user d’une imagerie grossièrement proapartheid (un vieux type friqué moustachu avec une cravate texane et un tablier et un sourire carnassier), LGD vend sans doute les PIRES FRITES AU MONDE à ce prix-là au moins — blafardes, fadasses, cuisson unique, molles, petit calibre formaté, on en passe et des pires). L’escroquerie le dispute à l’insipidité, la portion moyenne égalant à peu près en quantité de frites la petite portion, ce qui veut dire vraiment pas beaucoup de frites, et c’est rien de le dire… Reste que l’accueil dans l’aire d’autoroute de Verdun est cool et chaleureux et on peut avoir des sauces gratos, et manger jusqu’à 21 h. Ça coûte le prix de la liberté et on gagne rien, même pas des vraies frites bonnes.

Fritons au LGD

Personne sur l’autoroute, un soir de début d’hiver pluvieux, en pleine cambrousse, ça fait 2 heures qu’on roule et il reste encore 5 heures de trajet. On double un camion qui part après nous. Il nous fait des appels de ses 4 phares, qui sont ceux du dessus de la cabine, des super éclairants, les mêmes que sur les pick-up 4×4 suréquipés style étazunien.

Est-ce un signal ? Un test de communication ? Peut-être y’a un truc qui cloche, on perd une roue ? Le pare-choc arrière tombe ? Pu de feu arrière ? Avec les miquettes que je me tape en voiture, le mieux, c’est de vérifier… Ça tombe bien y’a une aire avec station essence, allumée et tout, qui survient. Comme on s’embranche vers le parkigne, le camion lui continue sa course sur la voie principale, se faisant doubler par une autre sporadique voiture dans le noir de la soirée avancée. Puis pareil pour elle, appel de phares. Mais ça c’est une autre histoire.

Arrivés devant la supérette de la station : un tour de la voiture confirme que tout est OK. Direction l’intérieur. On tente la frite. On a du bol à cette aire, c’est un LGD qui jouxte la supérette de la station dans le sens où il est encore ouvert. D’habitude aux stations on n’a jamais de pot : on n’a jamais faim à la bonne heure. En plus d’être à des tarifs exorbitants et d’être dégueulasse, la bouffe c’est souvent à des horaires incompressibles à la manque. L’heure des poules, la nuit est sale. Je sais pas si c’est qu’en France, mais ça encore c’est une autre histoire. Arrivés au comptoir, on a du bol² paskil est 20 h 38 un soir de semaine, et l’aimable snackier qui nous sert nous informe que bah oui on sert encore, on ferme à 21 h 30 ! Et ça, c’est un peu la même histoire que l’autre histoire. Alors on se commande la frite, 1 MOYENNE ET 1 P’TITE. Une chacun. Contents ! Pendant ce temps on regarde autour de nous, ce décor de carrelages blancs rutilants et probablement gras, éclairés par une lumière crue, criarde et dégueulasse. Sur l’avant-comptoir, une empreinte de chaussure bébé qui me met déjà en appétit. Comme j’ai grandi dans les environs, j’ai envie de poser des questions au jeune snackier des fois qu’on ait des connexions. On sait jamais ! Qu’il connaisse quelqu’un que je connais… Ou mieux que je le connaisse sans l’avoir reconnu avec les 20 ans qui séparent la présence de nos existences à cet endroit. Ça c’est l’histoire de ceux qui quand on dit qu’on est allé à Paris, ils font la connexion avec leur cousin qui y habite et demandent à tout hasard si on le connaît pas. Ça marche avec tous les pays, les grandes villes. En Meuse c’est un peu différent, comme c’est ultra rural avec ses 29 habitants au km², on connaît du monde sur une grande envergure de territoire. Aurélien le snackier est aimable et bonne pâte de s’être prêté à mon questionnogatoire. Bien évidemment 0 connexion nous relie. Et présentement, il met nos sachets de frites dans un sac en papier brun plus grand.

Dans la voiture, au moment de partager le miam, dilemme et perplexité arrivent. Impossible de reconnaître la moyenne frite de la p’tite ! Comme c’est pas moi qui ai payé, je me sens gênée dans le risque de me tromper en prenant la plus grosse portion. Y. fait une tronche déçue par la minisculitude des portions et quoi dire du surcommerce du LGD, ainsi que l’aliénation inhérente aux autoroutes et ces deux derniers points, ça, ce sont un gros morceau d’une autre histoire. Obligée de scruter avec un œil de lynx pour jauger la masse des deux petits paquets.

Les frites, pour en venir à ce qui nous amène.
Elles sont blanches, molles, froides, ultrafines et sans formes. Un pêle-mêle de fadasse, florilège de régurgitation potentielle, carrousel du prédigéré. À la louche, ça tire sur le jaune pâle industriel (peut-être un nouveau ton Pantone ?), ça n’a cuit qu’une fois et y’a déjà un moment que végète là-d’dans en attendant d’être servi. Et quoi dire de la taille des fritons avec leur longueur courte, à part qu’elle est vraiment courte. Elles mesurent 5 mm de largeur, à peu près, à vue de nez, comme celles du Maque D’eau. Des toutes petites frites qui absorbent bien l’huile. Plus d’huile que de patate. De l’huile qui coûte moins cher que la pomme de terre. Enfin le deal rentable non-ex aequo gras/matière. Le principe du LGD : l’exploitation. Son modèle : la domination. Sa méthode : l’addiction. Comme c’est même pas frit à point, si certaines font des bâtonnets, d’autres sont demi-molles et collées ensemble. Les extrémités pointues, elles, sont dures, pas dures-croquantes non, dures. Ça fait mal à la gencive si la frite ripe entre les dents. Quoi dire de la texture de la pomme de terre ? Enfin si c’est bien une frite d’une pomme de terre et pas de purée de pommes de terre. Mais bon peut-être vois-je le mal partout… et ça c’est une autre histoire. Bref une frite dont on n’a pas envie de parler mais on se le doit quand même parce qu’on y est passé, aliéné qu’on était à l’autoroute.

Une fois vide, on se rend compte qu’il y avait bien un sachet plus petit que l’autre. Ce que confirme un code couleur différent, un noir l’autre rouge. La différence de taille tient à ce que le sachet de la moyenne frite mesure 5 mm de plus en largeur que le noir de la p’tite. L’écart est peut-être un peu plus important sur la hauteur… Avec ça, combien peut-on mettre de frites de plus dans la moyenne portion ?

Nadège Adam et Yvon Ôboa